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Entretien avec Mgr Jean Laffitte, secrétaire du Conseil pontifical pour la famille, sur les mariages mixtes et entre des personnes de religions différentes

Cet entretien a été publié jeudi 4 avril 2013.
Publié le 09/04/2013

Quelle est la position de la doctrine catholique sur les mariages mixtes et interreligieux ?

Le terme "mariage mixte" ne s’applique qu’aux mariages entre chrétiens de différentes confessions - catholiques avec orthodoxes ou protestants, c’est-à-dire entre baptisés. Le mariage entre personnes de religions différentes est appelé "mariage avec disparité de culte". Pour les mariages mixtes, il faut une dispense de la part de l’autorité ecclésiastique. Il s’agit de mariages très populaires dans de nombreux pays, même en Europe. En Allemagne, par exemple, les familles composées de catholiques et de luthériens représentent la moitié de la population. Ces unions ne montrent pas de difficultés particulières, car les mariés ont tous deux pour référence le Christ. Toutefois, ce n’est pas si simple d’aimer quelqu’un quine partage pas la même appartenance religieuse ; vues les éventuelles implications possibles, le chrétien qui veut participer activement à la vie de foi, doit donc se demander si son conjoint n’entrave pas sa pratique religieuse. La foi catholique relie le mariage à un mystère qui est plus grand, à savoir celui de l'union entre le Christ époux et l’Église épouse. Pour les catholiques, le mariage est le septième sacrement et il ne représente donc pas seulement un signe de la volonté de l’union entre les deux mariés, mais le signe efficace de l’union du Christ avec l’Église et du baptisé avec le Christ.

Pour l’Église catholique, le mariage n’est pas seulement l’union entre un homme et une femme, mais un mystère ecclésial. Lorsque l’on se marie avec une personne de confession différente, il faut se poser les questions suivantes à l’avance - pour la pratique du culte, quelles seront les manières familiales de vivre la foi chrétienne à travers, par exemple, la prière commune, ou la confession dans laquelle les enfants sont baptisés et éduqués - ce qui représente un sujet de vie conjugale très important, qui ne peut certes pas être relégué dans l’indécision et renvoyé à la vie familiale après les noces. Pour obtenir l’autorisation de se marier de la part de l’autorité ecclésiastique, il faut un engagement des mariés à baptiser leurs enfants et à les éduquer dans la foi catholique. Il y a, ensuite, le problème de la notion du mariage comme sacrement, ce qui est valable seulement pour les catholiques et non pas pour les protestants qui ne croient pas à l’indissolubilité du mariage, justement parce qu’ils ne croient pas au mariage comme à un mystère d’union des époux avec le Christ, admettant par conséquent le divorce et le remariage. Pour les catholiques, au contraire, le Christ conclut dans le mariage, une alliance avec les mariés qui est, de par sa nature, irrévocable, et qui dure par conséquent jusqu’à la mort de l’un des époux. Il s’agit là de questions fort importantes qui nécessitent une pastorale consacrée.

Quelle est, au contraire, la condition des mariés avec disparité de culte ?

Nous parlons ici de mariages entre un conjoint chrétien et l’autre qui ne l’est pas. Il est impossible d’analyser ici, en détail, les problèmes spécifiques relatifs aux unions, par exemple, avec un hindou, un bouddhiste ou un shintoïste. Il s’agit, toutefois, de nombreux problèmes qui sont souvent insurmontables, qui font l’objet d’enquêtes et sont inclus dans les études et les recherches de la part des Conférences épiscopales des pays où le phénomène est surtout relevé, ou encore de la part des institutions académiques (l’Institut pontifical Jean-Paul II pour les études sur le mariage et la famille). En Europe, en Afrique, au Moyen-Orient et dans certains pays d’Asie comme l’Indonésie, la Malaisie et l’Inde, les mariages les plus répandus sont, au contraire, ceux entre croyants des religions monothéistes, en particulier entre catholiques et musulmans.

Afin que le mariage soit valable, il faut une dispense explicite de renonciation. Pour bénéficier de cette autorisation, il doit y avoir un accord entre les parties sur les fins et les propriétés essentielles du mariage. La partie catholique s’engage avec l’autre partie à main tenir et à vivre sa propre foi, à baptiser les enfants et à les éduquer dans l’Église catholique. Il est ainsi facile de percevoir, dès le début, la difficulté spécifique des unions islamo-chrétiennes.

La tradition islamique exige que les enfants musulmans soient élevés dans la religion du père musulman. Dans certains pays où la loi islamique est en vigueur, le mariage entre chrétiens et musulmans est même interdit. Dans d’autres, comme par exemple au Liban où la cohabitation des deux religions existe depuis longtemps, on relève des expériences positives de mariages entre musulmans et chrétiens. Cependant, la plupart des problèmes surviennent au fil du temps, après des années de vie conjugale, tels que les conflits sur l’éducation des enfants, la conception de la femme, ou tout simplement la différente ferveur religieuse des deux conjoints envers leur propre foi. J’ai connu des familles ayant une disparité de culte apparemment sereine, dans lesquelles la partie pratiquante était surtout celle musulmane. De la part des catholiques, il peut alors y avoir le risque d’un indifférentisme religieux dominant, qui amène le conjoint chrétien à se contenter de respecter le conjoint musulman, en renonçant à témoigner de façon visible sa propre foi en Jésus-Christ.

Les évêques du Moyen-Orient ont élaboré un document commun pour la pastorale des mariages mixte set avec disparité de culte. Une nouveauté qui montre un phénomène social croissant ?

Le document "Les mariages mixtes au Liban. Réalités et défis" présente une synthèse intéressante, et cela non seulement dans la perspective catholique, et prête attention par ailleurs à la condition concrète des couples de confessions différentes, en présentant de façon analytique une enquête sociologique et pastorale soignée qui se réfère au Liban et à d’autres pays du Moyen-Orient. Dans ces situations, l’on ne peut qu’exprimer un jugement positif lorsque sont réunies les conditions pour une vie familiale qui soit respectueuse des valeurs et des fins du mariage, et une foi commune en Dieu qui aide les deux mariés à tisser ensemble une authentique communion de vie et d’amour.
 

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