Centenaire des Fils de la Charité : journée d'action de grâce du 26 août 2018 — Diocèse de Saint-Denis-en-France

Aller au contenu. | Aller à la navigation

Outils personnels

Diocèse de Saint-Denis-en-France
menu
menu
  • dscf9927-ok.jpg
Actions sur le document

Centenaire des Fils de la Charité : journée d'action de grâce du 26 août 2018

La messe a été présidée par Mgr Jean-Pierre Cardinal Kutwâ, Archevêque d'Abidjan, notre évêque Mgr Pascal Delannoy, Mgr Marc Stenger, Evêque de Troyes.
Publié le 29/08/2018

Les Fils de la Charité : un Centenaire... un Chapitre Général
 

     
 (c) Hélène Négrini

Homélie du Cardinal Jean-Pierre KUTWÂ,
Archevêque d'Abidjan

A l'occasion de l'ouverture du premier Centenaire des Fils de la Charité

Jos 24, 1-18 / 1Th 1, 1-10 / Mc 6, 30-44
Paroisse Saint Etienne, Issy-les-Moulineaux
Dimanche 26 août 2018

"Benedicite, gentes, Dominum Deum nostrum. Et obaudite vocem laudis ejus."
"Peuples, remerciez notre Dieu, louez-le à pleine voix." Ps. 65, 8

 

Excellence Mgr Pascal DELANNOY, Evêque de Saint-Denis,
Excellence Mgr Marc STENDER, Evêque de Troyes,
Révérend Père Emmanuel SAY KOUAME, Supérieur Général des Fils de la Charité et son Conseil,
Révérends Pères,
Révérendes soeurs,
Chers frères et soeurs,

Les premiers mots qui me viennent à l'esprit à l'occasion de l'ouverture du premier centenaire de l'existence de la Congrégation des Fils de la Charité, ce sont ceux du psalmiste nous invitant à remercier notre Dieu et à le louer à pleine voix. Cent ans dans la vie d'une Institution, cela mérite bien que nous nous arrêtions pour dire à Dieu toute notre gratitude, Lui qui est le véritable instigateur de cette merveilleuse aventure ! Oui, Fils de la Charité d'ici et d'ailleurs et vous tous frères et soeurs venus vous unir d'intention à cette célébration eucharistique, bénissez le Seigneur ! Oui, bénissons-le, Lui qui écrit et continuera d'écrire l'histoire des hommes !

1918-2018 : voici cent ans qu'il a plu au Seigneur par le canal du Cardinal AMETTE de vénérée mémoire, d'autoriser Monsieur l'Abbé ANIZAN, alors Curé de Notre-Dame-Auxiliatrice de Clichy, à "constituer une nouvelle société religieuse, composée de prêtres et de frères ayant pour but spécial l'évangélisation populaire, principalement dans les paroisses ouvrières, sous le nom de Fils de la Charité."

Comme le mentionne "La petite vie du père ANIZAN", s'il a rencontré beaucoup d'obstacles et d'opposition sans que jamais ne l'abandonnent la confiance et le sens de l'amour qu'il puisait à la ource de l'Evangile, je veux parier que le chemin parcouru par votre congrégation durant toutes ces années, n'a pas été lui aussi facile. Mais depuis cette date mémorable, que de sentiers battus qui nous valent votre présence un peu partout dans le monde et cela à travers divers apostolats, comme pour dire que toute œuvre qui prend sa source en Dieu, reçoit de Lui son achèvement !

Chers amis de la grande famille des Fils de la Charité, 

Tout en rendant toujours grâce à Dieu pour vous et pour ce qu'il a réalisé avec vous et dans l'optique que la fête soit totale à la date choisie pour la clôture de ce jubilé, je voudrais m'interroger : quel bilan pouvons­-nous faire de ce premier centenaire ? Après cent ans d'existence, votre mission au service des pauvres et des travailleurs, a-t-elle atteint tous ses objectifs ? A quelles nouvelles formes de pauvretés devrez-vous faire face ? Quels nouveaux défis à relever face aux travailleurs d'aujourd'hui ? 

Quelles perspectives pouvons-nous envisager pour le futur de votre congrégation quand on sait que les situations de vies de nos frères et sœurs de par le monde, continuent de réclamer de la part des disciples du Christ que nous sommes, encore et toujours une parole qui les rejoigne et les réconforte, une action qui les remette debout, un geste qui les amène à comprendre et à croire que Dieu est encore présent dans notre monde et qu'II nous aime nonobstant les difficultés inhérentes à toute vie ?

De manière plus explicite, comment dire la présence de Dieu dans le monde de ce temps, ce monde qui est si fier de ses dernières conquêtes techniques et scientifiques, mais qui subit les conséquences d'un monde temporel que certains veulent réorganiser en faisant abstraction de Dieu ? Comment dire la présence de Dieu aux hommes d'aujourd'hui dont les progrès dans bien des domaînes, ne les ont pas rendus plus proches du vrai Dieu, sinon, des dieux qu'ils se sont eux-mêmes fabriqués et donnés ! 

Oui, comment faire comprendre à nos frères, aux pauvres et aux travailleurs confrontés à toutes sortes d'épreuves et qui ont l'impression d'être des oubliés de Dieu, que "les silences de Dieu" ne sont pas absence ou refus de la parole, mais au contraire, qu'ils sont accueil de toute parole intérieure où devrait s'enraciner toute parole extérieure ! Comment faire accepter à celui qui souffre que "les silences de Dieu" doivent être compris comme des occasions privilégiées qu'Il nous offre pour le rencontrer plus intimement ? Voici pour moi et sans pour autant être exhaustif, les défis actuels de notre monde.

Cependant, je veux vous rassurer. En effet, celui qui sait puiser profond dans la confiance en Dieu, Dieu Lui-même s'occupe de Lui ouvrir des chemins là où certains voient des impasses. Fort de cela, qu'il me soit permis d'esquisser quelques axes de réflexion qui à mon sens, nous permettraient de mieux bénéficier des grâces liées à la célébration de ce centenaire. 1. Que tous soient un afin que le monde croie. 2. Nous aussi, nous voulons servir le Seigneur, car c'est Lui notre Dieu. 3. La compassion de Jésus, annonce d'un nouveau départ.

1- Que tous soient un afin que le monde croie" !

Excellences, 
Révérends Pères, 
Chers frères et sœurs,

Cette prière du Christ rejoint dans une certaine mesure la première lecture de ce jour qui nous relate comment, au moment d'entrer dans la Terre promise, les Hébreux ressoudent leur unité en commémorant l'Alliance du Sinaï. Je crois fortement que c'est l'union des croyants qui donne le mieux à comprendre le mystère d'amour et de communion mutuelle entre le Père et le Fils et partant, amène le monde à croire que Dieu est encore présent et agissant dans le monde. 

Cette unité est à rechercher d'abord à un niveau personnel. Je crois qu'on n'offre aux autres que ce que nous avons. Que peut bien offrir aux autres un consacré tiraillé au-dedans de lui-même ? Cette unité personnelle, c'est celle qui s'obtient, comme pour votre fondateur, par "la confiance et le sens de l'amour à puiser à la source de l'évangile." Je vous invite donc à faire régulièrement ce voyage intérieur qui vous met en présence de Celui qui vous a appelés et choisis, comme pour le peuple à Sichem. 

Ensuite, et parce que vous provenez d'horizons divers, vous veillerez à faire de vos différences, une richesse et pour vous-mêmes, et pour ceux vers qui vous êtes envoyés. A ce titre, n'oubliez jamais que la vie des chrétiens que nous sommes, est un argument pour ou contre l'adhésion à la personne du Christ et le meilleur moyen de scandaliser le monde vers qui nous sommes envoyés, c'est d'étaler nos divisions ! Ce monde aura alors beau jeu de nous dire comme par ironie, ''Médecin, guéris-toi, toi-même !" Cela suppose que nous ne tournions pas en drame les heurts et autres difficultés inhérentes à toute vie en société !

Chers amis Fils de la charité,

Dites-moi, si nous ne sommes pas unis entre nous comment annoncez le Christ avec crédibilité à des cœurs qui crient vengeance, à ceux qui ont tout perdu, biens et même envie de vivre ? Sachez-le, aujourd'hui plus que jamais, tacitement ou à grands cris, toujours avec force, le monde nous interroge : chrétiens, croyez-vous vraiment à ce que vous annoncez ? Vivez-vous ce que vous croyez ? Prêchez-vous vraiment ce que vous vivez ? C'est dire que plus que jamais, le témoignage de la vie des chrétiens que nous sommes, est devenu une condition essentielle de refficacité profonde de la prédication. De ce fait, nous voici responsables de la bonne marche de l'évangile que nous proclamons, et partant, de la crédibilité de notre Eglise. 

Je crois que c'est notre foi au Christ, non pas celle qui varie en fonction des circonstances du moment, mais celle qui est capable de déplacer les montagnes, qui nous permettra de surmonter au mieux les appréhensions et autres difficultés, lorsque nous nous heurterons aux forces hostiles, symbole de tout ce qui entrave la marche de l'homme vers sa pleine réalisation. Pour y parvenir, il nous faut faire profession de foi en affirmant notre indéfectible attachement au Dieu unique et vrai que nous révèle Jésus !

2- Nous aussi, nous voulons servir le Seigneur, car c'est Lui notre Dieu

Excellences, 
Révérends Pères, 
Chers frères et sœurs,

Toujours dans la première lecture, immédiatement après la conquête de la Terre promise, Josué convoque le peuple et le place devant ses responsabilités ; il lui présente l'alternative radicale dans laquelle il se trouve : servir le Seigneur ou servir les autres dieux, les dieux des habitants de Canaan. Tous répondent unanimes : "plutôt mourir que d'abandonner le Seigneur pour servir d'autres dieux !" 

Par cet engagement, le peuple reconnaît que le Seigneur l'a sauvé : "c'est le Seigneur notre Dieu qui nous fait monter, nous et nos pères, du pays d'Egypte, cette maison d'esclavage ; c'est Lui qui, sous nos yeux, a opéré tous ces grands prodiges et nous a protégés tout le long du chemin que nous avons parcourus, chez tous les peuples au milieu desquels nous sommes passés." Il en tire donc les conséquences : "nous aussi, nous voulons servir le Seigneur, car c'est Lui notre Dieu." De là naît leur attachement à Dieu à travers le renouvellement de l'Alliance.

Chers amis Fils de la Charité,

La nécessité de renouveler continuellement l'Alliance avec Dieu est également une donnée importante dans notre marche à la suite du Christ, car sur la route de la vie, rien n'est jamais acquis. Cette Alliance à renouveler concerne chacun de vous pris individuellement, au risque de devenir des fonctionnaires au service des sacrements et de vos frères. Ce qu'ils attendent de vous, c'est bien les fruits de votre relation particulière avec le Christ car vous savez bien que c'est notre témoignage de vie qui importe le plus dans ce monde.

Ce témoignage de vie, c'est celui qui induit le peuple à ce que je considère comme une nouvelle profession de foi. Comme vous le savez sans doute, nous vivons dans un monde où tous cherchent le bonheur et cette quête, pousse nombre de nos contemporains à se lancer sur des chemins où le plus souvent, l'homme est la mesure de toute chose, sans référence aucune à Dieu. A Sichem, Josué n'a pas manqué de mettre le peuple face à ses responsabilités, bien plus, il a lui présenté une alternative radicale : servir le Seigneur ou servir les autres dieux. Par votre compassion, aidez-les à faire le bon choix. 

3- La compassion de Jésus, annonce d'un nouveau départ

Excellences, 
Révérends Pères, 
Chers frères et sœurs,

L'évangile rapporte que les Apôtres, après leur mission, s'en retournent vers Jésus pour Lui rapporter ce qu'ils ont fait, ce qu'ils ont enseigné. Selon ce que le Maître leur avait recommandé, ils ne se sont pas contentés d'enseigner mais ont agit, en particulier, ils ont pris soin et témoigner beaucoup d'affections aux malades. Jésus les invite à se reposer : "vous autres, venez à l'écart dans un lieu désert et reposez­-vous un peu." 

Cette invitation à se reposer un peu, à reprendre des forces, à se retrouver est à comprendre comme le signe du recul à prendre par rapport à l'action, le second souffle avant un nouveau départ. Ce nouveau départ, c'est bien ce qu'exprime le mouvement de la foule qui voit partir Jésus avec ses disciples mais qui n'est pas décidée à leur laisser ce temps de repos. Elle se précipite vers l'endroit où ils se rendent, elle les précède même ! L'évangile nous révèle que Jésus était parti sur la barque vers un lieu isolé, mais lorsqu'II arrive, le lieu n'est pJus calme : une grande foule l'attend. En débarquant, Jésus voit la foule nombreuse et est ému, Il est pris de pitié. Un sentiment de compassion l'envahit car Il se rend compte que ces individus isolés sont comme des brebis sans Pasteur. 

La compassion qu'éprouve Jésus à l'égard de cette foule, c'est celle qui annonce un nouveau départ et le pousse avant tout à enseigner. Tous ont besoin de la vérité. La vérité guide dans la vie. Nous ne pouvons survivre sans lumière et, pour nous, la lumière c'est la vérité ! Celui qui ne connaît pas la vérité essentielle ne peut trouver le bon chemin dans la vie, il s'égare, se disperse, et se perd dans les impasses. La vie n'est plus alors qu'une continuelle source de désespoir. En revanche, celui qui est guidé par un enseignement religieux profond, peut avancer avec confiance dans la vie. Il peut dépasser les épreuves et même en tirer profit et avoir ainsi une existence pleinement réussie. C'est à cela que je vous engage. 

Chers amis,

Il est significatif que la compassion pousse, avant tout, Jésus à enseigner, à expliquer à ceux qui l'entourent comment il convient de se comporter avec Dieu, avec le prochain, avec tout ce qui nous entoure. C'était là à mon avis, une des pensées fortes de votre fondateur quand il disait : "si le monde est sauvé, ce sera par la charité." Je prie pour que cette belle parole vous conduise aujourd'hui, demain et tous les jours.

Bonne fête à tous !

+Jean Pierre-Cardinal KUTWÂ,
Archevêque d'Abidjan

 
(c)  Frédéric Tonquedec

 
(c) Hélène Négrini