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8-30 ans en quartier populaire, une traversée accompagnée par l'Eglise

Prêtres et laïcs des quartiers populaires se sont retrouvés samedi 30 mai 2015 pour ce 3e Colloque organisé au Collège des Bernardins.

Cité Dolet (Jérôme Panconi-Ville de Saint-Ouen)

Publié le 09/06/2015

À la demande des évêques des huit diocèses l’Île-de-France une enquête est menée au printemps 2010 sur l’actualité de l’évangélisation en monde populaire de l’Église catholique en région parisienne. Cette enquête, conduite par Mgr Renauld de Dinechin, évêque auxiliaire de Paris, accompagné de délégués des diocèses d’Île-de-France, a cherché à observer comment l’Esprit saint travaille dans le monde populaire. Suite à cette étude les évêques décident d’organiser un colloque. En mai 2011, le premier colloque porte sur « Les 121 expériences qui ont été dégagées lors de l’enquête ». Cela a permis de rendre compte du travail accompli par tous les acteurs de la pastorale du monde populaire et de favoriser des échanges d’expériences.

En avril 2013, un deuxième colloque porte sur « L’Église partenaire des familles dans l’éducation de leurs enfants ». Par leur connaissance du terrain, des intervenants tels que le P. Jean-Marie Petitclerc, Jaklin Pavila et Jacques Arènes ont su nourrir et éclairer, à travers des conférences,  les acteurs de la pastorale en quartier populaire. À cette occasion, de nombreux témoins ont pu s’exprimer lors des tables rondes et à travers une vidéo.

Le 31 mai 2015 a eu lieu la troisième édition avec 5 ateliers : catéchèse et transmission, jeunes chrétiens confrontés à l'islam, interculturalisme, accompagner vers l'engagement social, l'Eglise qui construit des personnes.
Durant un après-midi des chrétiens interpellés par la solidarité et l’évangélisation ont réfléchi sur la mission, grâce à des témoignages de catholiques engagés sur le terrain et des paroles d’experts sous la présidence des évêques d’Île-de-France.

 

Dans son édition datée du 2 juin 2015, Anné-Bénédicte Hoffner, journaliste au quotidien La Croix donnait un écho du parcours de foi et de l'engagement de Nino Bolangi et Garry Dokou, deux jeunes du diocèse de Saint-Denis.

Nino et Garry, deux évangélisateurs en banlieue

Au fond de la salle, quelques jeunes collégiens sont venus écouter le témoignage de celui qu’ils connaissent sous son nom de scène : El Nino (La Bonne Nouvelle). Prenant son courage à deux mains, l’un d’eux ose la question qui leur brûle les lèvres : « Tu as grandi comme nous dans une cité. Je voudrais savoir : quel est ton secret pour être aussi mature aujourd’hui ? » Casquette en arrière et tee-shirt siglé au nom de son premier album, La Renaissance, Nino Bolangi, 26 ans, les impressionne : Ce géant au regard doux, qui a grandi à Aulnay-sous-Bois, dans le quartier de la Rose-des-Vents et sa tristement célèbre « cité des 3 000 », celle qui fut au cœur des émeutes de 2005, est devenu à la fois éducateur sportif, rappeur, et catholique engagé.

Lui-même n'a « rien brûlé », jure-t-il, assis entre deux prêtres sur une estrade du Collège des Bernardins à Paris, pour ce colloque organisé par les huit diocèses d’Île-de-France sur « L’évangélisation en quartier populaire ». Mais à cette époque-là, « ado rebelle », il voulait comme les autres montrer ce dont était « capable » son quartier. Et utilisait le rap pour exprimer son « mal-être », son ressentiment. « Mon secret ? », hésite t-il aujourd'hui. « Je dirais que l’Église a toujours été présente. C'était mes parents qui m’y poussaient, mais elle était une échappatoire dans l'univers assez hostile où je vivais, parce qu’on n’y est pas jugé. Quand je priais, je n’étais plus "Nino des quartiers" mais "Nino face à Dieu". Jamais je ne me serais affirmé comme chrétien devant tout le monde, mais je me suis appuyé là-dessus : savoir que le Christ est avec moi. »

Et puis, il y a eu ce déclic, en 2010, lorsque sa paroisse lui a demandé d'accompagner des jeunes au Frat de Lourdes. Une révélation pour le jeune homme qui ne s'était « jamais senti responsable jusque-là » et a lu dans les yeux des collégiens le modèle qu’il incarnait pour eux. « Quand je suis revenu, j’ai commencé à réviser mon bac, et même je l’ai eu ! » Depuis, les engagements se succèdent : JMJ, préparation à la confirmation, et désormais création d'une association, Golgotha Music, qui propose des activités sportives et artistiques aux jeunes, chrétiens ou non, pour faire le lien entre « le quartier et la Bonne Nouvelle », Au début le projet a fait « un peu peur » à la paroisse, mais finalement « la mayonnaise a pris », assure Nino, qui aimerait désormais qu'un prêtre accompagne son petit groupe, « comme un référent ». Transmettre à d'autres cette « confiance » qui lui a été donnée, « éviter aux autres de vivre ce qu’(il a) vécu » est devenu son leitmotiv.

Même moteur, même énergie : aide conducteur de travaux dans le bâtiment, Garry Dokou n’a que 23 ans, mais il consacre tout son temps libre aux jeunes de sa paroisse de Neuilly-sur-Marne, en Seine-Saint-Denis également. Son histoire, comme celle de Nino, illustre nombre des problématiques mises en évidence l'an dernier par un Service famille et société de la Conférence des évêques. Lui-même a connu la solitude et le doute vers 15-16 ans, peu après son baptême, lorsque son groupe de confirmation s’est « éclaté ». « Il n’y avait pas de proposition de l’Église pour moi, je n’avais que des amis musulmans, alors moi aussi j’ai failli le devenir », raconte-t-il tranquillement, sans agressivité aucune.

Questionné par le divorce de ses parents, il est intéressé par le « cadre » que propose l’islam, par la « simplicité » de son message. « Quand on est chrétien, il faut plus fouiller pour trouver son bonheur », reconnaît-il sans fard. Sans en parler ni à son curé ni à ses parents, avec qui il n’a guère « l’habitude de parler de ça », il se met à lire la Bible et le Coran.

Mais la vraie réponse, c'est au sanctuaire de La Salette qu’il l’a trouvée, lors d'un pèlerinage. « J’ai mieux répondu à mes questions en partageant avec d’autres. À l’école aussi, il y a les cours et l'alternance : moi, j’ai besoin d'allier la théorie à la pratique », analyse-t-il.

Depuis, sa paroisse lui a confié des responsabilités… tellement d’ailleurs que le tout jeune fiancé souhaiterait être davantage épaulé : l’encadrement des 15-17 ans, celui des 18-35 ans, et même un groupe de catéchèse d’enfants. « Les petits, je leur faisais le caté et en même temps, j’apprenais des choses. Aujourd'hui, un musulman peut me dire ce qu’il veut, je saurai quoi lui répondre ! », plaisante Garry. Parce qu’il sait bien que le samedi après-midi, entre « le ciné et le caté, le choix est vite fait », il multiplie les propositions aux jeunes de sa paroisse pour les « souder » et qu’ils y sentent « une deuxième famille ».

Il vient aussi de les emmener à La Salette, malgré - ou peut-être à cause - des déceptions qu’ils lui avaient causées pendant l’année avec leurs bêtises d'adolescents… « Ça les a réveillés, ils ont compris qu’il n’y a pas d’un côté le caté, et de l’autre la vie, mais que venir à l’église nous permet de bien vivre. »

Anne-Bénédicte Hoffner
Avec l'aimable autorisation du journal
Site Internet de La Croix
 


(c) Pierre Denis Autric

Nino Bolangi, 26 ans, et Garry Dokou, 23 ans, témoignent de leur parcours de foi au service des jeunes.