Le corbeau et le renard : produire local n’est pas une fable
Exposition "Le Génocide des Arméniens de l’Empire ottoman", au musée de Drancy (article publié en mai 2021)
Le Mémorial de la Shoah de Drancy a rouvert ses portes le 19 mai 2021, conformément aux règles établies par les autorités publiques. L'occasion d'y découvrir une exposition temporaire très documentée et bouleversante, "Le Génocide des Arméniens de l’Empire ottoman". Un drame historique de grande ampleur, qui préfigure d'autres drames du XXe siècle. Découvrir cette exposition, en place jusqu'au 11 juillet, c'est prendre conscience de l'horreur vécue dans le passé, pour s'en prémunir au futur.Une histoire riche et contrastée
La légende veut que les Arméniens descendent de Haïk, arrière-arrière-petit-fils de Noé par Japhet. Il est généralement admis qu’ils seraient une des tribus thraco-phrygiennes qui, arrivées des Balkans en Asie Mineure vers 1200 avant notre ère, ont conquis l’antique royaume d’Ourartou et imposé leur langue indo-européenne. Leur présence est attestée dès le VIe siècle avant notre ère par les sources perses et grecques.
« Échangerais histoire grandiose contre meilleur emplacement géographique » : cette boutade polonaise pourrait résumer l’histoire tourmentée de l’Arménie. Pour ce bastion montagneux situé à un carrefour stratégique entre l’Europe et l’Asie, sur les voies de commerce et d’invasions, l’histoire est en effet une succession de phases d’indépendance et de soumission, d’unification et de morcellement, d’âges d’or et de pages sombres.
L’adoption précoce du christianisme au IVe siècle, une Église nationale et la création d’un alphabet au Ve siècle ont forgé une identité forte, qui a survécu même en l’absence d’État. Le dernier, le royaume de Cilicie, disparaît en 1375. L’Arménie est bientôt partagée entre les empires ottoman et persan.
Ainsi commence l'histoire riche et tourmentée de l'Arménie. Une histoire dont l'exposition "Le Génocide des Arméniens de l’Empire ottoman" nous conte les pages les plus sombres et dont il importe de faire mémoire.
Déclaration de l’Entente • Paris, 24 mai 1915 : « Depuis un mois environ, la population kurde et turque de l’Arménie procède de connivence et souvent avec l’aide des autorités ottomanes à des massacres des Arméniens. De tels massacres ont eu lieu vers la mi-avril à Erzeroum, Dertchun, Eguine, Akn, Bitlis, Mouch, Sassoun, Zeitoun et dans toute la Cilicie ; les habitants d’une centaine de villages aux environ de Van ont été tous assassinés ; dans la ville même, le quartier arménien est assiégé par les Kurdes. En même temps, à Constantinople, le Gouvernement ottoman sévit contre la population arménienne inoffensive. En présence de ces nouveaux crimes de la Turquie contre l’humanité et la civilisation, les gouvernements alliés font savoir publiquement à la Sublime Porte qu’ils tiendront personnellement responsables des dits crimes tous les membres du Gouvernement ottoman ainsi que ceux de ses agents qui se trouveraient impliqués dans de pareils massacres. »
L'histoire racontée par Claire Mouradian, commissaire scientifique de l'exposition
"Le génocide des Arméniens de l’Empire ottoman"
Le Mémorial de la Shoah de Drancy a souhaité commémorer le 106e anniversaire du génocide des Arméniens, précurseur des violences et crimes de masse du XXe siècle, mais qui continue de faire l’objet d’un déni.
Dans le contexte propice de la première Guerre mondiale, le régime dictatorial et ultra-nationaliste du Comité Union et Progrès à la tête de l’Empire ottoman, a mis en œuvre la destruction systématique et planifiée de ses citoyens arméniens : arrestation et exécution des notables de la capitale et des grandes villes, massacre des hommes adultes et des conscrits, déportation de toute la population civile vers les déserts de Syrie et de Mésopotamie, élimination des survivants de ces marches de la mort dans des camps de concentration... D’avril 1915 à décembre 1916, environ 1 200 000 Arméniens ont été assassinés.
Interdits de retour par la République turque dirigée par Mustafa Kemal, les rescapés et leurs descendants forment aujourd’hui une diaspora mondiale, principalement en Russie, aux États-Unis, au Moyen-Orient et en France.
C'est le récit détaillé, incarné par des objets du quotidien, des photos, textes et vidéos que nous conte cette exposition. Ouverte au public depuis le 19 mai, elle se visite jusqu'au 11 juillet. Entrée libre.
Visite guidée expresse de l'exposition
Informations pratiques
Le Mémorial de la Shoah est ouvert tous les jours de 10h à 18h, sauf le vendredi et le samedi. Il est fermé en août.
Mémorial de la Shoah de Drancy, 1110-112, avenue Jean-Jaurès, 93700 Drancy
+ 33 (0)1 42 77 44 72
Contacter le musée par e-mail.
Site web : http://drancy.memorialdelashoah.org/
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