En ces heures du décès du pape émérite et de l’hommage qui lui est rendu, souvenons-nous ! Pendant huit années, à chaque messe, nous avons prié pour « Notre pape Benoît ». Et, le lundi 11 février 2013, surprise avec l’annonce de sa renonciation. Ainsi, Benoît XVI, cet immense théologien devenu Pape, se retirait pour vivre dans le silence, la prière et l’étude et devenait « pape émérite ».
Le dernier jour de 2022, en la fête de Saint Sylvestre, Pape du IVème siècle, il nous a quittés. Depuis l’annonce de son décès, le peuple de Dieu a reconnu en lui un homme de Dieu, bon, cultivé devenu, en avril 2005, Pasteur de l’Eglise catholique.
Né en Bavière en 1927, ordonné prêtre en même temps que son frère en 1951, évêque et cardinal en 1977, archevêque de Munich, il a ensuite travaillé à Rome près du grand Jean-Paul II, pendant 25 ans. Lors de sa première bénédiction, il s’est présenté comme « un simple et humble travailleur dans la vigne du Seigneur ». Simple et humble, il l’a montré tout au long de sa vie de prêtre, d’évêque et de Pape. Permettez les souvenirs de deux rencontres avec le cardinal Joseph Ratzinger.
En janvier 2004, alors évêque de Pontoise depuis quelques mois, j’ai le privilège d’une « visite ad limina » à Rome. Visite marquée par la rencontre avec le pape Jean Paul II, mais aussi avec le cardinal Ratzinger. Avec les évêques d’Ile-de-France, nous sommes impressionnés par son écoute et ses réponses limpides aux questions abordées.
Fin octobre de la même année, à l’aéroport de Rome, fortuitement, j’aperçois le cardinal, seul, attendant l’avion pour Munich. Je me présente, en rappelant la rencontre de janvier. Nous échangeons quelques paroles, en évoquant les cardinaux Lustiger et Gantin, ses amis. Je suis vivement impressionné par sa douceur, sa bonté, sa mémoire et sa simplicité.
Quelques mois plus tard, il est élu Pape ! Il sait alors la difficulté de la tâche, mais, avec foi, courage et détermination, il accomplit cette nouvelle mission. On se souvient du jour où il a reçu cette mission de successeur de Pierre, après un bref conclave. Le mardi 19 avril 2005, il devient le 265ème successeur de Pierre et choisit le nom de Benoît XVI en référence au moine Saint Benoît et en mémoire de Benoît XV, Pape au moment de la première guerre mondiale. Il dit ainsi ce que sera son pontificat : prière, enseignement de la foi, continuité du Concile Vatican II, paix et réconciliation. Allemand, il a connu les horreurs de la guerre. Européen, il se souvient du triste passé des deux guerres mondiales, au 20ème siècle. Lui, le premier Pape élu du 3ème millénaire affirme ainsi son « programme », en soulignant qu’il n’y a pas d’autre programme que celui de l’Evangile et de la Tradition. Lui, théologien éminent, connait bien ce grand penseur, Augustin, qui disait : « Foi et Raison sont les deux forces qui nous amènent à la connaissance ». Désormais, le nouveau Pape va enseigner. Et quel enseignement il nous a donné !
Une explosion de joie des Romains qui connaissaient l’humble cardinal salue son élection. Et les jeunes vont l’acclamer en scandant «Be-ne-de-to » Puis, les catholiques de tous les continents viennent écouter le nouveau Pape. Dans le souvenir de Saint Jean-Paul II, encore présent dans les mémoires, une phrase dit tout : « On venait voir Jean-Paul II. On vient écouter Benoit XVI ».
A Cologne, en août 2005, nous sommes les témoins émerveillés de ce premier voyage du Pape pour les JMJ. Lui, le professeur habitué aux amphithéâtres d’université enseigne désormais les jeunes de tous les pays. Il leur parle de l’Eucharistie. Lui, l’homme de bureau, devenu l’homme en blanc, pasteur universel, accepte de voyager pour visiter de nombreux pays, dont le nôtre en 2008.
Que de souvenirs des voyages de Benoît XVI dans le monde ! A Cracovie, en 2006, pour honorer son prédécesseur polonais. Rencontre avec les centaines de milliers de jeunes dans le grand parc de Blonia. Messes. Pèlerinage à Auschwitz avec l’arc-en-ciel qui s’élève sur Birkenau, au son de la musique d’un orchestre composé d'artistes juifs. Joie d’avoir été là, ainsi que lors de ses deux voyages en Afrique : à Yaoundé, au Cameroun, en 2009 et à Cotonou, au Bénin, en 2011.
Je me souviens encore des JMJ à Sydney, en Australie, en 2008, Benoît XVI ayant accepté ce long voyage aux antipodes pour cette rencontre avec les jeunes. Les JMJ de Madrid en 2011. Lui vit ces grands moments dans un heureux étonnement, et dans la joie de l’enthousiasme des jeunes, disciples du Christ.
Et, nous, en France, nous nous souvenons de sa visite historique, en septembre 2008. Quelle merveille ! L’accueil unanime, les messes sur l’esplanade des Invalides à Paris et à Lourdes, ainsi que la conférence magistrale au collège des Bernardins.
Par ailleurs, je ravive le souvenir de la décision de Benoît XVI, qui m’a nommé évêque de Basse-Terre, en Guadeloupe, en 2012, peu de temps avant sa renonciation.
Enfin, je dois souligner combien la grâce d’une semaine en Bavière m’a permis de mieux comprendre cet homme de Dieu visitant différents lieux : naissance, baptême, études, ordinations sacerdotale et épiscopale.
Oui, nous pouvons rendre grâce pour ce don de Dieu à notre Eglise. Lui-même dans son testament bref, exprime son action de grâces à Dieu pour ses parents, ses amis, son service de l’Eglise en Allemagne et à Rome. Pour lui, les épreuves et les souffrances n’ont pas manqué. Mais il connaissait et citait la phrase de son maître, Saint Augustin : « L’Eglise marche dans son pèlerinage entre les persécutions du monde et les consolations de Dieu ».
Vous qui lisez ces lignes, pour en savoir plus, je vous recommande deux livres épais publiés récemment : « Benoît XVI, une Vie » en deux tomes par Peter Seewald (édition Chora). Passionnante biographie nous faisant comprendre et aimer notre pape Benoît. Ce livre se termine par une interview parlant de l’amitié avec son successeur : « La première rencontre avec le nouveau Pape à Castel Gandolfo restera pour moi comme une belle lumière. Comme vous le savez, l’amitié personnelle avec le pape François a non seulement perduré, mais elle a continué à grandir. »
L’hommage rendu à Rome par les dizaines de milliers de personnes venant se recueillir est impressionnant. Tout comme le seront ses funérailles ce jeudi sur la place Saint Pierre. Je tenais à y participer au nom de tant de chrétiens et en mon nom personnel.
+ Jean-Yves Riocreux
3 janvier 2023
Crédit photo : Vatican Media