Ce matin le camp des migrants, essentiellement des demandeurs d'asile qui se trouvait à la Porte de Paris à Saint-Denis a été évacué. C'est, dans notre pays, une énième évacuation, une de plus !
Nous devrions nous réjouir d'une mise à l'abri de ces personnes, respectueuse de leur dignité. Malheureusement, personne n'est dupe. Au regard des évacuations précédentes nous savons que la plupart d’entre elles, d'ici une semaine ou deux, seront à nouveau à la rue. A quoi bon, dès lors, déployer de tels moyens pour reproduire ailleurs la même situation qui suscitera, à son tour, une nouvelle évacuation ? Il y a là une spirale infernale qui conduit notre société à la désespérance et au mépris de l’homme.
Cette spirale n’est pas inéluctable et le pape François, dans sa dernière encyclique, nous indique d’autres chemins : « Reconnaître chaque être humain comme un frère ou une sœur et chercher une amitié sociale qui intègre tout le monde ne sont pas de simples utopies. Cela exige la décision et la capacité de trouver les voies efficaces qui les rendent réellement possibles. Tout engagement dans ce sens devient un exercice suprême de la charité. En effet, un individu peut aider une personne dans le besoin, mais lorsqu’il s’associe à d’autres pour créer des processus sociaux de fraternité et de justice pour tous, il entre dans le champ de la plus grande charité, la charité politique… » (Fratelli tutti, § 180). Un peu plus loin, le pape François illustre ses propos : « Si quelqu’un aide une personne âgée à traverser une rivière, et c’est de la charité exquise, le dirigeant politique lui construit un pont, et c’est aussi de la charité » (§ 186).
A l’heure où notre pays engage des moyens financiers considérables pour soutenir ceux et celles qui souffrent de la pandémie et de ses multiples conséquences comment ne trouverait-il pas, pour peu que nous le voulions réellement - simples citoyens et dirigeants politiques - les ressources nécessaires à l’accueil des migrants ?
Saint-Denis, le 17 novembre 2020.
+ Pascal Delannoy
Evêque de Saint-Denis
et le Service diocésain de la Pastorale des migrants