Visite à Brazza — Diocèse de Saint-Denis-en-France

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Visite à Brazza

Favoriser les échanges et la solidarité entre communautés catholiques du monde entier par la prière, le témoignage, et la solidarité financière est la mission du père Jacques Meunier, délégué diocésain à la coopération entre Église, parti visiter les communautés du Congo-Brazzaville en ce début d'année. Il nous raconte la première partie de sa visite.
Publié le 17/03/2016

Vendredi 8 janvier, je suis accueilli à Brazza par deux prêtres chargés par leur évêque de me piloter durant mon séjour : les pères Borice Kevin Mokele, curé de la cathédrale d'Owendo (entre autres) et Julien Ndinga Djama, directeur du “moyen séminaire” de Makoua... Ca a commencé, le soir de mon arrivée, par une réception à l'ambassade de France, concoctée par le père Borice… J'ai apprécié la grande simplicité de l'ambassadeur ! Je suis resté deux jours pleins (trois nuits) à Brazza, logé dans la communauté des soeurs de Ribeauvillé, sur la paroisse du Christ Roi. Ces soeurs assurent entre autres de l'enseignement, de la maternelle (privée) jusqu'au lycée public. Et j'ai passé deux soirées avec repas dans des familles. Dimanche, il y a eu une grand messe solennelle pour le départ du nonce, suivie d'un repas dans les jardins de l'évêché de Brazza.

Lundi 11 janvier : Départ pour Owendo (à 510 km au nord de Brazza), dans une camionnette lourdement chargée de matériel (bidons d'essence, bouteilles de butane, riz, pneus, etc.) pour quelques paroisses et pour le séminaire. Je suis logé dans la communaué des soeurs de St-Joseph de Cluny. Je reste 5 jours à Owendo, partageant les repas avec l'équipe des prêtres qui réside au presbytère de la paroisse-cathédrale. Je rencontre quelques chrétiens enseignants, les religieuses (de St-Joseph de Cluny) enseignantes aussi. L'une des soeurs, congolaise, est diplômée internationale en gymnastique. Partage avec l'évêque de ce diocèse, Mgr Victor Abagna Mossa, qui est à l'origine de la demande de jumelage entre nos deux diocèses. Un homme d'une grande simplicité.

Samedi 16 janvier : Départ pour Makoua, à 70 kilomètres au nord-ouest de Owendo. Je loge au séminaire. Je partage les repas avec l'équipe des responsables du séminaire à des heures mouvantes ...

Dimanche 17, j'ai revu l'évêque, venu célèbrer une messe anniversaire dans la paroisse de Makoua pour un général, décédé il y a 3 ans, bienfaiteur de l'Eglise. J'ai quelques dialogues avec des enseignants du séminaire (certains enseignent aussi au lycée public voisin ou au lycée catholique voisin), et avec plusieurs des jeunes du séminaire. Plusieurs, en terminales, m'ont posé la question : pourraient-ils venir faire leur séminaire à Saint-Denis ?…

Il est prévu que je parte prochainement pour l'Est du diocèse.

Quelques flashs qui m'ont marqué dans cette prise de contacts

Il y a bien sûr le climat (je pense à vous qui grelottez…). Nous sommes sous l'équateur.

Au plan social

A Brazza, mais aussi à Owendo, il y a nombre de petits étalages le long des rues principales, pour vendre des fruits, des légumes, des boissons, des poissons, des vêtements, des parapluies (ou ombrelles !)… Nombre aussi de petites boutiques de coiffure, de quincaillerie (à Brazza, un nombre impressionnant de quincailleries !), de casse-croûte et buvette, etc. avec des enseignes souvent à consonnance religieuse (buvette “à la Grâce de Dieu”, etc.). Cela correspond à ce qu'on appellerait chez nous des “petits boulots”. On vend aussi à ces étals des bidons d'essence que l'on paye plus cher qu'à la pompe, mais à la pompe, il faut faire la queue… En décembre, il y a eu des pénuries d'essence.

Le nombre d'enfants, souvent très petits, soit au dos de leur maman, ou marchant le long des routes. La moyenne d'âge est très jeune, ce qui entraîne des classes très chargées, jusqu'à 100 jeunes, et même davantage ! On a du mal à imaginer cela en France !

Extrait de “La Semaine Africaine” (bi-hebdomadaire d'information et d'action sociale, paraissant au Congo-Brazzaville) – n° 3549, du 1er décembre 2015 : «  Il est sans conteste que le système éducatif congolais est en butte à de sérieux problèmes, à en croire le constat de Mme Rosalie Kama-Niamayoua, quand elle fut ministre de l'enseignement : “Au collège, 84 % des enseignants ne sont pas qualifiés, par rapport aux 32 % du lycée. Les taux d'échec sont généralement élevés. Au collège, ce taux varie entre 21 et 62 %, avec un grand pourcentage pour les classes de troisième. En fait, depuis plusieurs décennies, la réussite à l'examen d'entrée au lycée n'a plus jamais atteint 50 %. Au lycée, le taux des jeunes redoublants atteint une moyenne de 20 %, avec des variations pour les classes de seconde (32 %). »

L'habitat, à ce qui se donne à voir là où je suis passé, est souvent très rudimentaire : on a l'impression d'habitations de fortunes. Il y a quelques maisons en dur. On voit des constructions en cours (les échaffaudages sont faits de tiges de bois) – certaines semblent abandonnées, mais c'est sans doute que la progression de la construction se fait à un rythme très lent, en fonction des ressources disponibles pour l'achat des matériaux. A côté de cela, il y a quelques beaux quartiers avec des maisons de luxe. Mais j'en ai vu peu. Peut-être parce que ce ne sont pas des quartiers par lesquels j'ai eu l'occasion de passer.

Au plan ecclésial

Une forte pratique religieuse. Les messes en semaine (à 6h ou 6h30 le matin), rassemblent, là où je suis passé, une bonne quarantaine de personnes. Le dimanche l'église est comble. La liturgie est célébrée soit en français, soit en lingala, soit en mixte. Les messes en semaine sont animées à tour de rôle par un groupe de chrétiens (la Légion de Marie, ou tel autre groupe). Les chants sont chantés forts, mais leur rythme est lent. Les réponses à la messe sont, elles aussi, prononcées lentement et très fort. Ces deux premiers dimanches passés sur place, j'ai assisté à des messes qui ont duré pas loin de 3 heures, mais c'était des messes “spéciales” (départ du nonce et messe du souvenir célébrée par l'évêque)… avec de longues listes d'intentions (à l'offertoire), et de longues annonces. J'ai pensé aux paroissiens de “chez nous” qui trouvent que nos célébrations d'une heure sont trop longues… Mais ces longues célébrations sont vivantes, animées : on frappe dans ses mains, les gens se déplacent pour déposer leur offrande pour la quête, etc. A la messe de dimanche dernier, a été ajoutée après la communion l'initiative (apparemment non programmée) du prêtre responsable du renouveau qui a remis un grand cierge allumé à un paroissien, et une foule de paroissiens est venue allumer un cierge à ce grand cierge, dans une certaine bousculade – avant qu'intervienne (au bout de 10 minutes) un des célébrants pour faire cesser cette démarche… J'ai demandé après coup le sens de ce geste (contesté par plusieurs estimant qu'elle n'avait pas sa place au cours de la messe) : le prêtre responsable du renouveau m'explique que cette lumière va circuler dans d'autres paroisses, et que son sens est de rappeler aux baptisés qu'ils sont la lumière du monde...

Une forte présence de l'Eglise dans la formation scolaire : beaucoup d'établissements scolaires sont pris en charge par les paroisses ou les congrégations religieuses St-Joseph de Cluny, Soeurs de la Doctrine Chrétienne, etc.) : de la maternelle au lycée. Les effectifs par classe sont moins lourds que dans les établissement publics et la formation s'en ressent. Les familles contribuent aux charges de la formation. Certains lycées publics qui étaient la propriété des paroisses ou du diocèse ont été nationalisés par le pouvoir en 1965. Il y a actuellement une démarche progressive de restitution, au moins partielle.

Des adultes chrétiens, dont plusieurs sont ou ont été formés au séminaire, travaillent dans la fonction publique, ou ont des responsabilités professionnelles (au Plan, cadre adminstratif en hôpital ...). J'ai rencontré plusieurs enseignants du public, très engagés dans leur paroisse. C'est le cas aussi de religieuses qui enseignent dans le public.

Il y a un grand nombre de groupes de prière. Il y a la Légion de Marie, qui me semble très développée, au moins où je suis passé. Mais aussi de nombreux autres groupes ou “confréries” se donnant un nom ou un patronnage. Ces groupes sont structurés, avec un ou une responsable. Ces responsables se retrouvent à l'invitation du curé ou de l'équipe paroissiale pour recevoir des avis, ou des orientations, des décisions paroissiales – pour faire passer le message dans ces groupes de prière. Un prêtre me disait que, dans ces groupes de prière, il y a beaucoup de prière et peu de silence, et que lors des moments d'adoration du Saint Sacrement, il faut une animation, sinon les gens s'endorment…

Les moyens matériels, économiques des paroisses, comme des communautés religieuses, sont fragiles. Même pauvreté pour la gestion du diocèse… L'accueil que je reçois est chaleureux, mais les conditions sont souvent spartiates. A Owendo, j'ai redécouvert l'utilisation du seau d'eau et de la cuvette pour se laver le matin… La pompe chargée d'amener l'eau est tombée en panne…

Jacques Meunier, à Makoua, le 22 janvier 2016

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