Le « Notre Père » est la prière que Jésus a enseignée à ses disciples. Elle est fondamentale pour les chrétiens catholiques, orthodoxes et protestants. Le 3 décembre, premier dimanche de l’Avent, une nouvelle version entre en vigueur. Le changement porte sur le 6ème verset : « Et ne nous soumets pas à la tentation » qui devient : « Et ne nous laisse pas entrer en tentation ». Voici le nouveau texte :
Notre Père, qui es aux cieux, que ton nom soit sanctifié,
que ton règne vienne,
que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.
Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour.
Pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés.
Et ne nous laisse pas entrer en tentation
Mais délivre-nous du Mal.
Amen
La décision de modifier la prière du Seigneur n’allait pas de soi car c'est la plus mémorisée par les fidèles et car elle est "œcuménique".
La traduction officielle liturgique de la Bible est une œuvre collective de plus de soixante-dix spécialistes, exégètes, hymnographes, hommes et femmes de lettres… c’est le résultat d’un long processus de dialogue permanent.
Depuis une quarantaine d’années, plusieurs traductions avaient été étudiées :
« Fais que nous n’entrions pas en (dans la) tentation ».
« Ne nous fais pas entrer dans la tentation ».
« Ne permets même pas que nous entrions en tentation » mais, aucune n’a été jugée satisfaisante.
La formule « Ne nous soumets pas à la tentation » a toujours suscité le débat. Elle laisserait entendre que Dieu met à l’épreuve le fidèle, qu’il serait lui-même tentateur. Donc, assez pervers. La nouvelle formule « Ne nous laisse pas entrer en tentation » invoque plutôt la protection de Dieu contre le danger de la tentation.
De fait, les Evangiles parlent de Jésus conduit par l’Esprit au désert pour y être tenté (Matthieu 4 11) ou du conseil que Jésus donne à ses disciples à Gethsémani : « Priez pour ne pas entrer en tentation » (Matthieu 26, 41).
Demander au Père de ne pas nous « laisser entrer en tentation », c’est lui demander la force de combattre et d’écarter complètement la tentation comme le fils l’a fait.
La tentation n’est pas une théorie (tout ce qui tente, attire, incite à quelque chose, crée le désir, l’envie) : c'est un fait concret qui touche l’expérience humaine dès les origines (cf. Genèse 3). Ce n’est pas Dieu qui tente l’homme mais le « serpent », le « diable », c’est-à-dire celui qui veut diviser, briser l’amitié entre Dieu et sa créature. Même Jésus, le fils de Dieu, a été tenté plusieurs fois dans sa vie ; le serpent a cherché à l’éloigner de son Père.
L’« Evangile », la bonne nouvelle, est qu’en Jésus tout homme peut vaincre toute tentation. Comme Jésus, nous pouvons nous en remettre entièrement au Père qui « est fidèle et ne permettra pas que nous soyons tentés au-delà de nos forces » (1 Co 10, 13).
Faire face à la tentation peut donc devenir une expérience importante car cela nous aide à re-situer le rôle et la place de Dieu dans nos choix, face à ce qui nous semble bien et bon. En compagnie de Dieu, la tentation devient un appel à notre liberté, au discernement, à une conversion permanente. C’est là le sens profond de cette demande : Seigneur, garde-nous de douter de Toi.
Dans sa lettre aux Romains 7 v 19, Paul reconnait les traces du péché d’origine : « Le bien que je veux, je ne le fais pas et le mal que je ne veux pas, je le fais ». Avec lui, nous pouvons tirer une leçon d’espérance, la conviction que nous sommes tous placés sous la « Miséricorde de Dieu ».
Soeur Bernadette, soeur de la Miséricorde de Sées, à Montreuil.
Le 14/11/17