La réflexion ne doit pas être accaparée par les seuls « experts ». Les questions que doit résoudre la loi de bioéthique ne trouveront pas réponse dans les seuls éléments de connaissances scientifiques. Elles concernent chacun d’entre nous, dans sa vie personnelle et dans son expérience familiale. Tout ce qui est médicalement possible ou scientifiquement envisageable n’est pas toujours moralement et humainement exigible, quand bien même l’argument thérapeutique serait mis en avant.
La dignité de la personne sera au centre de plusieurs débats. Elle sera citée par exemple à propos de la gestation pour autrui (les mères porteuses), des dons d’organes ou encore de la recherche sur l’embryon, pour mettre l’accent sur le risque de confondre personne et chose. Le débat sera exigeant. Le principe d’autonomie sera de plus en plus mis en avant pour justifier telle ou telle pratique. Comment sera-t-il fait droit aux principes de solidarité et de responsabilité ? La loi actuelle, pour ce qui concerne la recherche sur l’embryon, énonce un interdit mais prévoit une dérogation. Ce qui fait aujourd’hui office de compromis moral entre des positions contraires, sera-t-il maintenu ? Doit-il être maintenu ? Ces débats sont difficiles, parce que souvent chaque sujet met au jour une souffrance, et parce que la liberté de la connaissance est une valeur fondamentale.
Le vote au Parlement, quel qu’il soit, ne rendra pas caduc le questionnement. La conscience restera toujours un sanctuaire inviolable, à charge de l’éclairer et de la former. D’où la nécessité d’une réflexion éthique, comme le propose chaque année notre comité diocésain de réflexion éthique. La réflexion éthique n’est ni conservatrice, ni progressiste, elle est « subversive ».
Elle interpelle modes de pensée et d’agir, en dérangeant tout ordre établi par l’audace d’une mise en question des certitudes, des émotions, des pouvoirs, des pensées dominantes et des modes.
Alain Cordier
Sortie dans la revue « Les uns et les Autres », N°252 – Février 2009